VSB - Avril 2013
La carte des vins au prix caveau.
Louis Privat, restaurateur à Narbonne, révolutionne la consommation du vin à table. Vente au verre et prix caveau pour développer vigoureusement l’exercice commercial. L’établissement est révolutionnaire.
Depuis 1989, en précurseur, Les Grands Buffets de Narbonne, proposent les plats à volonté sur la base de la bonne cuisine traditionnelle française pour un prix de couvert aujourd’hui établi à 27,90€. Pour cette note, on peut déguster langouste, foie gras poêlé, cochon de lait, accéder à un plateau de desserts qui propose une centaine de références. Depuis la réouverture en mars dernier (après travaux), la révolution permanente, pensée, calculée puis organisée par Louis Privat, a gagné la carte des vins, définitivement. Tous les crus de cette carte 100 % régionale (soixante-dix références) sont proposés au verre et au tarif caveau. “ Il s’agit de démontrer ici une vraie loyauté, une sincérité pour défendre les territoires et les vins régionaux. La vente au prix caveau nous a permis d’augmenter considérablement la consommation du vin pour accompagner les repas. En cinq ans, nous sommes passés d’une commande moyenne de 12cl de vin par couvert à 22 cl aujourd’hui. Et les clients choisissent de bons vins parce qu’ils sont conscients qu’ils le paient au juste prix ” explique Louis Privat qui a lancé la grande offensive marketing sur le vin en 2008. “ Nous avons d’abord baissé le prix de l’eau minérale. C’était un test. Nous avons proposé une bouteille d’eau à 1€, au lieu de 2,5€. Nous avons immédiatement multiplié nos ventes par 5. Alors, nous avons prolongé le mouvement avec le vin, six références triées sur le volet comme le Grand Opéra, un cru réputé des Corbières. Le succès a été immédiat.”
Le service au verre permet toutes les audaces.
“ Avant, on ne vendait pratiquement jamais de grands crus régionaux. Les clients se contentaient exclusivement de notre entrée de gamme, un bon vin sincère, bon rapport qualité-prix mis en bouteille par la cave Rocbère de Portel-Des-Corbières. C’était déjà plusieurs crans au-dessus du pichet classique ” poursuit Louis Privat. La clientèle locale, voire régionale (à 60%) a profité de l’effet d’aubaine. Et le service au verre permet les audaces, les découvertes, tranche les différends de prescription. “ Pour le choix du vin à table, le dénominateur commun intervient. À table, il faut s’accorder sur une bouteille ou identifier le prescripteur. Le dévoiement de ce système, c’est la montée en flèche de la consommation du vin rosé qui met bien souvent tout le monde d’accord. Si on veut remettre de la décision devant les assiettes, il faut vendre le vin au verre ” assène Louis Privat qui va ainsi totalement réorganiser le système de la vente des vins par étapes successives.
Pour cela, il bénéficie de l’impressionnante force de frappe de son établissement. En 2012, le restaurant de cuisine française Les Grands Buffets a dressé 240 000 couverts, avec en pointe au mois d’août 36 000 couverts, 1 200 par jour pour 300 places et au moins six cents demandes refusées chaque dimanche. Les clients ne se contentent pas de boire plus et mieux à table. Ils passent commande, quand ils sont satisfaits ou enchantés. Et ils le sont souvent.
65 000 cols vendus en 2012.
En 2012, Les Grands Buffets ont vendu à emporter 30 000 bouteilles pour un exercice commercial complet à 65 000 cols pour l’ensemble de l’établissement. Le Private Bowling Pub, résurgence commerciale et conviviale du restaurant Les Grands Buffets organise les “afterwork” du narbonnais et l’amorçage du système de commercialisation des vins régionaux. L’établissement propose une sélection d’une cinquantaine de bières et seize grands vins régionaux au verre, conservés sous azote et servis grâce à une carte magnétique (12,5 cl ou 3 cl en format dégustation). La sélection et le conseil sont assurés par la sommelière Sophie Veyrat, qui mélange les valeurs sûres (Puech Haut, Daumas Gassac, Gérard Bertrand) et les coups de coeur (Hautes Vignes), pour amener en douceur le consommateur vers cette fameuse découverte oenologique avec les amuse-gueules servis gracieusement et à volonté. Ainsi le verre de la Cuvée Cigalus de Gérard Bertrand est-il facturé 5,20€ (28€ la bouteille à table). La porte du Ciel du Château La Négly, s’ouvre à 14,70€ le verre (85€ la bouteille), la cuvée Atal Sia 2010 du Château Ollieux-Romanis est à 3,50€ le verre (18€ la bouteille). Depuis la mi-mars, Louis Privat, fin gestionnaire amateur de révolutions a poussé le curseur encore un peu plus loin. Il offre la bouteille consommée à table pour six achetées. Un moment sceptiques, les producteurs applaudissent la performance commerciale qui donne des cauchemars à la restauration classique. Christian Goutorbe.